Ottawa veut protéger le chevalier cuivré, sauf à Contrecœur
Le ministère des Pêches et des Océans (MOP) du Canada présente un projet d’arrêté ministériel visant la protection de l’habitat essentiel du chevalier cuivré, excluant la réserve nationale de faune des îles de Contrecœur.
Par cet arrêté ministériel, le MOP veut « l’interdiction de détruire toute partie de l’habitat essentiel du chevalier cuivré », peut-on lire dans la Gazette du Canada du 20 février.
En effet, l’arrêté en conseil s’appliquerait à « toute activité en cours ou future pouvant entraîner la destruction d’une partie de l’habitat essentiel du chevalier cuivré en dehors de la réserve nationale de faune des îles de Contrecœur », sous risque de poursuite de la Couronne.
Le projet du Port de Montréal à Contrecœur vise l’aménagement d’un terminal portuaire à conteneurs d’une capacité de 1,15 million de conteneurs par an. Bien que l’habitat du chevalier cuivré soit menacé par les travaux de ce projet d’envergure, l’Administration portuaire de Montréal (APM), le promoteur, propose des mesures d’atténuation et de protection, des protocoles d’intervention et des plans de mesures d’urgence préliminaires pour minimiser les impacts des travaux sur l’environnement.
D’ailleurs, l’Agence d’évaluation d’impact du Canada a conclu en novembre dernier que la mise en place de ces atténuations « permettra d’éviter des effets négatifs environnementaux importants », tandis que le projet en lui-même « n’est pas susceptible d’entraîner des effets environnementaux cumulatifs sur les milieux humides, le chevalier cuivré et la rainette faux-grillon de l’Ouest ». Une décision définitive de l’évaluation environnementale du projet du port de Contrecœur est prévue au printemps.
« Le projet de port à conteneurs devrait avoir des répercussions sur les poissons et leur habitat, y compris le chevalier cuivré et son habitat essentiel. Cependant, basé sur l’information qui a été fournie jusqu’à présent et la compréhension actuelle des impacts anticipés, le MPO est de l’avis que ces impacts peuvent être évités, atténués et compensés », mentionne le projet de règlement.
Effectivement, le MPO souligne avoir tenu compte des zones sensibles pour le chevalier cuivré concernant le projet de port à conteneurs, mais croit au plan de compensation des répercussions du projet sur son habitat. De ce fait, « le décret concernant l’habitat essentiel ne devrait pas avoir de répercussions considérables sur le projet de Contrecœur dans le cadre de l’évaluation environnementale », selon le ministère.
Pour sa part, le directeur de l’APM, Martin Imbleau, a déclaré en conférence de presse : « Nous sommes confiants avec nos mesures de compensation pour la protection du chevalier cuivré et autres espèces du Saint-Laurent pour réaliser pleinement le projet ».
L’APM doit effectuer une demande de permis au MPO en vertu de la Loi sur les espèces en péril afin de mener légalement des travaux dans le fleuve. Toutefois, le gouvernement fédéral martèle que le chantier n’aura aucune difficulté à s’amorcer.
Québec a d’ailleurs annoncé une aide financière de 55 M$ en janvier, justement pour engager les travaux du port de Contrecœur, un projet évalué entre 750 et 950 M$. Les travaux préliminaires pourraient démarrer dès cet automne, pour une mise en service en 2024.
Consultation publique
Les Canadiens interpellés par le dossier sont invités à participer à la discussion sur le futur arrêté ministériel via des commentaires sur le site Internet de la Gazette du Canada jusqu’au 21 mars prochain. « La participation du public aux périodes de commentaires est une étape importante pour nous assurer que nous protégeons les espèces au profit de divers écosystèmes », mentionne le MPO par voie de communiqué.
Déception des organismes environnementaux
La Société pour la nature et les parcs du Canada (SNAP) et le Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE) se disent « préoccupées » de certains propos se trouvant dans la proposition d’arrêté, dont le passage qui explique que le décret ne devrait pas avoir de répercussion sur le projet du port de Contrecœur.
« Avec ces commentaires inappropriés et irresponsables, le gouvernement canadien compromet l’intégrité du processus d’évaluation et de délivrance des permis prévu à la Loi sur les espèces en péril », exprime Alain Branchaud, directeur général de la section québécoise de la SNAP.
La SNAP et le CQDE ont déposé un recours juridique pour que le ministère se conforme aux exigences de la Loi sur les espèces en péril le 7 janvier dernier et entendent poursuivre leurs démarches juridiques.
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