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Crise du logement : Résultats d’une enquête sur les conditions de vie et d’habitation des ménages locataires de l’agglomération de Longueuil

Vendredi 12 juin 2020 12:10 Juliette Poireau

Jeudi 11 juin, en conférence virtuelle, les membres du comité-recherche de la Coalition des organismes de l’agglomération de Longueuil pour le droit au logement ont présenté les résultats d’une vaste enquête sur les conditions de vie et d’habitation de 1 000 ménages locataires de l’agglomération de Longueuil.

Jusqu’à présent, aucun portrait des conditions de vie de l’habitation à l’agglomération n’avait encore été fait. L’objectif de cette enquête était d’aller à la rencontre des locataires du territoire pour comprendre leurs réalités, d’évaluer les enjeux et de faire connaître les ressources disponibles quant aux droits des locataires dans le but de déterminer des actions à poser pour améliorer la vie de ces citoyens et citoyennes.

Avec plus de trois ans de travail, les résultats de l’enquête démontrent qu’il y a « indéniablement urgence d’agir » en matière de logements sur le territoire. En tout, 1 000 locataires ont été rencontrés et 997 ont émis un formulaire complet, ce qui représente un échantillonnage adéquat pour refléter la situation actuelle.

Le questionnaire, qui comportait 75 questions, englobait dix dimensions d’analyse : les nuisances et l’insalubrité, le sentiment de sécurité et d’insécurité, les discriminations ou violences vécues, la consommation de tabac et/ou de cannabis, les connaissances sur leurs droits et leurs recours, la situation de santé mentale et physique, ainsi que les données démographiques et socioéconomiques.

Camille Girard-Marcil, professionnelle de recherche, a présenté les résultats et les faits saillants de l’enquête :

Pour l’ensemble du territoire de l’agglomération de Longueuil, 71 % des répondants déclarent avoir rencontré au moins un problème d’insalubrité ou de nuisances au cours de la dernière année, tandis que 19 % en ont éprouvé cinq ou plus. Parmi ces nuisances, 24 % affirment sentir l’odeur de cannabis dans leur logement et 20 % l’odeur de la cigarette. De plus, 23 % mentionnent avoir eu un problème de vermines, 13 % déplorent un manque de chauffage et 11 % témoignent la présence de moisissure ou de champignons.

Concernant le sentiment de sécurité, 58 % des répondants ont vécu au moins une complication liée à la sécurité au cours des 12 derniers mois. 25 % assurent que les entrées des immeubles sont mal déglacées pendant l’hiver, 22 % affirment que certaines portes ne se verrouillent pas et 8 % confient n’y avoir aucun détecteur de fumée dans leur résidence.

Certains groupes sociaux plus vulnérables

Également, l’enquête a révélé que plusieurs groupes sociaux bien définis rencontrent plus de difficultés dans leur habitation, notamment les femmes locataires et monoparentales, les ménages à faibles revenus, les nouveaux arrivants ou encore les personnes issues d’une minorité visible.

En effet, parmi les 60 % des femmes participantes à l’étude, 58 % ont un revenu annuel inférieur à 29 000 $, soit 10 % de moins que les hommes. De plus, une femme sur dix mentionne avoir subi de la discrimination dans son logement ou par son voisinage, et le même ratio quant à la violence. De toutes les femmes répondantes, 76 % sont des femmes monoparentales.

Selon les 997 sondés, 21 % sont des ménages locataires à faibles revenus, c’est-à-dire avec moins de 15 000 $ annuellement. Parmi eux, 29 % ont vécu trois ou plus d'incidents liés à la sécurité, 24 % au moins cinq problèmes d’insalubrité et 26 % trouvent leur habitation trop petite. Néanmoins, le prix mensuel moyen d’un loyer est de 649 $ sur le territoire de l’agglomération, ce qui représente plus de 50 % du revenu des locataires. En tout, 33,4 % des ménages sont dans cette situation dans la région. Et puis, 179 des répondants révèlent bénéficier de l’aide sociale, soit 18 %.

242 des participants à l’étude ont indiqué s’identifier à une minorité visible, dont un sur dix témoigne avoir postulé plus de cinq fois pour trouver un logement. Certains n’ont pas de bail et d’autres ne connaissent même pas leur propriétaire. Également, 70 % mentionnent avoir éprouvé au moins un problème d’insalubrité au cours des 12 derniers mois et 24 % ont développé une complication physique depuis leur arrivée dans leur habitation.

Une situation similaire pour les nouveaux arrivants. Parmi les répondants, 124 sont nés à l’extérieur du Canada, dont 90 depuis moins de cinq ans. 90 % d’entre eux vivent à Longueuil et à Brossard.

Droits en tant que locataire et services communautaires

Une autre situation préoccupante que met en lumière cette étude, c’est que la plupart des répondants ne connaissent pas leurs droits en tant que locataire ou les organismes communautaires qui peuvent leur venir en aide.

En effet, 73 % n’ont entrepris aucune démarche pour faire valoir leurs droits au logement, 77 % ignorent le prix du loyer avant leur arrivée, 8 % n’ont pas signé de bail et 7 % n'ont jamais rencontré leur propriétaire. Et puis, 67 % n’ont jamais fréquenté d’organismes communautaires.

Recommandations

Les membres du comité-recherche de la Coalition des organismes de l’agglomération de Longueuil pour le droit au logement suggèrent de créer un comité multidisciplinaire et multisectoriel pour réunir l’ensemble des acteurs municipaux, des instances et des groupes communautaires intervenant en logement afin de développer des stratégies pour mieux protéger les locataires de l’agglomération de Longueuil.

L’élaboration d’un Plan d’action pour les mal-logé.é.s fait partie des propositions dans le but de donner la parole au mal-logé.es et de faire entendre cette parole auprès des instances et de planifier des actions politiques et de mobilisation afin de gérer les changements structurels nécessaires sur le plan local.

Le comité-recherche désire aussi rendre publics les constats d’infraction des propriétaires et tenir un registre des logements insalubres.

De plus, les membres demandent aux organismes de la Coalition de mettre en place des comités d’actions collectives pour mieux intervenir auprès des groupes vulnérables, comme les femmes monoparentales ou les minorités visibles, en plus d’assurer un suivi envers les locataires en leur rappelant leurs services.

Concernant les instances politiques locales et nationales, le comité-recherche réclame des engagements concrets pour le développement de logements sociaux sur le territoire de l’agglomération, et souhaite la construction de 500 unités universelles de logements sociaux par année pendant cinq ans, soit 50 000 nouvelles unités. Pour ce faire, les membres suggèrent l’inclusion de 20 % d’unités d’habitation de logements sociaux dans tous les développements immobiliers et la création d’une réserve foncière dans les coffres des villes pour avoir des terrains.

« Nous espérons que cette enquête inédite et réalisée d’une manière rigoureuse servira de référence en ce qui a trait aux enjeux en matière de logement et à leur priorisation sur le territoire pour les prochaines années. Nous voulons également que ce projet génère des actions concrètes afin de mieux soutenir les ménages locataires qui vivent des problèmes de logement liés à l’insalubrité. Il y a urgence d’agir ! », a souligné Guy Levesque, coordonnateur à la Maison La Virevolte et membre du comité-recherche.

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