Les étudiants en pharmacie désertent le public pour le privé
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Une pénurie importante de pharmaciens dans les hôpitaux de la Montérégie inquiète l'Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec (A.P.E.S.), qui demande l'aide du gouvernement afin d'attirer davantage d'étudiants dans la profession.
D'après les données fournies par l'A.P.E.S, la situation est critique dans plusieurs secteurs clés du système de santé. Dans les services d'urgence, par exemple, où la promptitude et l'efficacité sont primordiales, plus de 50% des besoins en pharmaciens ne sont pas satisfaits.
Cette lacune compromet gravement la sécurité et le bien-être des patients, accroissant les risques d'incidents médicaux, croit la présidente de l'association, Julie Racicot.
« On devrait actuellement être le double de pharmaciens dans les urgences de la Montérégie, mais ce n'est pas le cas. Pourtant, les bénéfices d'avoir un pharmacien à l'urgence sont nombreux », explique-t-elle.
La présence du pharmacien permet, entre autres, d'éviter des hospitalisations, de réduire la durée du passage à l'urgence, de diminuer des tests qui auraient été faits inutilement ou de s'assurer que le patient n'aura pas à consulter de nouveau.
Un besoin criant
L'oncologie, un domaine où la précision et la vigilance sont cruciales, n'est pas épargnée. Près de 14% des besoins en pharmaciens pour assurer des traitements vitaux restent inassouvis, mettant en péril la santé et la vie de certains patients.
Dans les unités de soins intensifs et coronariens, où les médicaments sont souvent complexes et nécessitent une expertise pointue, la situation est tout aussi préoccupante, avance l'A.P.E.S. Près de la moitié des besoins en pharmaciens demeurent non couverts, compromettant la gestion médicamenteuse des patients hospitalisés et augmentant les risques d'erreurs médicales.
Quant aux patients sous dialyse rénale, parmi les plus vulnérables, la situation est alarmante, avec un taux de 94 % de besoins en pharmaciens non pourvus. Cette carence met en danger la sécurité médicamenteuse de ces patients dont les besoins sont particulièrement sensibles et complexes.
Manque d'étudiants
Sans un recrutement massif de pharmaciens, la capacité des équipes de soins à répondre adéquatement aux besoins des patients est compromise, ajoute Mme Racicot, ce qui se traduit par une augmentation du temps d'attente aux urgences.
Présentement, 114 bourses sont disponibles pour les étudiants à la maîtrise en pharmacologie avancée. Or, seulement une cinquantaine d'étudiants sont actuellement sur les bancs d'école, déplore l'A.P.E.S.
« Les conditions sont beaucoup plus alléchantes dans le privé, ce qui fait que 80% des élèves qu'on forme vont aller au privé plutôt qu'en établissement », indique Julie Racicot.
L'association exhorte donc le gouvernement à prendre des mesures concrètes pour valoriser la profession pharmaceutique. Cela inclut des investissements massifs dans le recrutement de personnel, l'amélioration des conditions de travail et des salaires attractifs pour les pharmaciens d'établissement.
De plus, elle demande une reconnaissance formelle de la maîtrise en pharmacothérapie avancée, ainsi qu'une plus grande autonomie pour les pharmaciens diplômés de ce programme.